
L’Euro digital ou numérique (e-euro) pour la circulation: présentation par la Lituanie
- décembre 05, 2020
- par
- Pierre



Le 30 novembre 2020, la société ROCKIT, société support de start-up baltes spécialisées dans les technologies financières a organisé une conférence à distance sur un sujet au coeur de l’actualité depuis plusieurs mois. Elle a été appuyée par la Banque Centrale de Lituanie et par la Banque Centrale Européenne.
Afin de contrer les tentatives de création de « e-monnaies privées » par différentes entités privées, dont les principaux sont FACEBOOK et la plate-forme de vente AMAZON, la BCE souhaite créer un e-euro ou euro digital.
Cet e-euro est une monnaie digitale. C’est une vraie monnaie, contrairement au bitcoin qui n’est une unité de compte, sans cours légal officiel et surtout sans aucune garantie sur sa pérennité dans le temps. Le bitcoin a surtout été un véhicule spéculatif. Mais il reste encore coupé de l’économie réelle. Par exemple, aucun salaire et aucun loyer n’est par exemple payé en bitcoin.
La BCE sera le garant du futur euro digital, s’il voit le jour.
La création d’un euro digital ou numérique pose plusieurs interrogations:
- L’intervenante qui présente le sujet au début de la vidéo indique que la demande de cash en Europe est de plus en plus faible pour ce qui concerne l’euro en tant que moyen de paiement. Nous ne pouvons pas dire si cette affirmation est avérée. Toutefois la demande globale de billet euro pour le moins est en constante augmentation depuis 2002, date du passage à l’euro. Les statistiques disponibles sur le site de la BCE l’attestent. Cela s’explique en partie par le fait que l’euro comme toute monnaie est aussi un instrument de thésaurisation, de réserve de valeur. Par exemple, beaucoup de ressortissants de pays d’Europe de l’Est n’ayant pas encore adopté l’euro stockent leurs économies en billets euro « sous le matelas ». Ils ont en effet une confiance très relative dans le système bancaire et dans la devise locale.
Billets euro en circulation depuis 2002 (courbe de couleur noire) – source: BCE
- L’euro digital ne doit pas faire disparaître le cash selon les intervenants à cette conférence. C’est toutefois un risque induit et d’ailleurs c’est un argument mis en avant par le représentant de la SVERIGE RISKBANK (banque centrale suédoise). Il met en opposition un graphe qui établit que le cash représente en 2020 moins de 1% de la valeur du PIB suédois. Ce qu’il oublie toutefois de préciser c’est qu’entre 1950 et 2020, le PIB suédois a été multiplié par 600 sur la même période, en valeur brute non retraitée. Si l’on prend en considération cette donnée, la proportion n’est plus la même et la valeur du cash en circulation par rapport au PIB est la même qu’en 1950. Il représente bien plus de 1% da la valeur du PIB.
L’évolution du PIB suédois depuis 1968, multipliée par 600 depuis 1968 en valeur brute
(non corrigée de l’inflation) – source: TRADINGECONOMICS.COM/WOLD BANK
- L’euro digital ne doit pas être un outil de spéculation. La BCE doit y veiller. Il devrait y avoir une surveillance de la BCE sur ce point. Cela risque d’être délicat puisque l’euro digital est avant une monnaie. Donc, il fera l’objet de manoeuvres spéculatives à la hausse ou à la baisse. Or, contrairement au bitcoin, cela aura un impacte puisque les salaires et les loyers (pour continuer sur le même exemples) sont payés en euro. Il y a donc un risque accru d’exposition des usagers de l’euro (entreprises et particuliers) à la spéculation.
- Selon la représentante de la BCE, l’usage de l’euro digital doit être gratuit « pour ses usages basiques », c’est à dire comme moyen de paiement. Toute autre opération pourrait donc générer des commissions bancaires. Il faudra que les autorités précisent ce point car le cash lui est d’un usage quasi-gratuit, qu’il soit utilisé comme moyen de paiement ou comme réserve de valeur. C’est d’ailleurs peut être là que le bas blesse car le secteur bancaire voit le cash comme une charge sans contrepartie significative. Cela ne sera probablement pas le cas de l’euro digital.
- L’euro digital doit être sécurisé et empêcher toute tentative de contrefaçon. La Banque Centrale de Lituanie a expérimenté une technologie de sécurisation d’une e-monnaie avec son projet 2020 de monnaie digitale pour collectionneurs. En cela, la Lituanie est un véritable laboratoire monétaire.
- La question principale restera qui pourra créer de la monnaie c’est à dire qui pourra « miner » l’euro digital? Dans le système actuel, ce sont les banques qui créent de la monnaie. Avec l’euro digital, ce pouvoir devrait bénéficier à d’autres entités (mais pas les particuliers en tout cas comme avec le beat coin), sous le contrôle de la BCE. Là aussi ce point devra être précisé car il n’est pas sans présenter de risque…
- Enfin, le secteur du cash emploie en Europe plusieurs millions de salariés selon une étude économétrique allemande de 2019. Dans un contexte post-covid19, est il opportun d’avoir ce genre de discours alors que le chômage de masse va vraisemblablement exploser en Europe en 2021?
Tous ces points étant précisés, nous vous invitons à suivre la vidéo de la conférence sur l’euro digital.
Les participants à cette réunion sont:
- Marius JURGILAS ( administrateur de la Banque de Lituanie)
- Austeja SOSAKAITE (analyste de la BCE)
- Martinas PILKIS (conseiler du conseil d’administration de la Banque de Lituanie)
- Carl Andreas CLAUSSEN (Conseiller senior du département des paiements – SVERIGES RISKBANK c’est à dire la Banque Centrale de Suède)
La BCE a mis en ligne un module pour sonder les européens sur la mise en place du futur euro digital.
Nous vous invitons à y participer puisque l’on nous demande notre avis. Comme le disait le sage: « Il vaut mieux que tu t’occupe de ton avenir avant que quelqu’un d’autre ne s’en occupe à ta place ».
Vous pouvez donc participer à l’enquête d’opinion de la BCE à l’adresse suivante:
Your views on a digital euro (escb.eu)
Sources: Banque de Lituanie – société ROCKIT – NUMISMAG.