Exclusivité : La Monnaie Royale de Belgique 6 mois après la fermeture de l’atelier monétaire

Exclusivité : La Monnaie Royale de Belgique 6 mois après la fermeture de l’atelier monétaire

L’atelier de la Monnaie Royale de Belgique a fermé ses portes le 1er  janvier 2018. Depuis, la fabrication des pièces de monnaies belges a été confiée à la Monnaie des Pays Bas. Plus de six mois après cette révolution majeure dans le paysage numismatique européen, NUMISMAG a jugé opportun d’interviewer Madame Ingrid VAN HERZELE, mintmaster de la MRB, sur cette profonde réforme de structure et de faire le point avec elle sur ce sujet.

 

Ingrid VAN HERZELE, mintmaster de la MRB

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NUMISMAG : Madame VAN HERZELE, nous vous remercions tout d’abord d’avoir pris le temps de répondre à nos questions. Est-ce l’abandon de la frappe des pièces de 1 et 2 cents par la Belgique qui a entraîné la décision de fermer l’atelier de frappe de la MRB ?

INGRID VAN HERZELE: Ceci ce n’est qu’un élément dans un ensemble de motifs qui ont entrainé la fermeture de l’atelier de la Monnaie de Belgique. La frappe des pièces de 1 et 2 cents est coûteuse et  on constate en général une diminution de la monnaie en circulation au profit de la monnaie électronique.   Le sujet du futur de la MRB était un point repris dans l’accord gouvernemental  de 2014. Le Conseil des Ministres a validé la décision en mars 2017 et l’a annoncé dans le communiqué de presse du 17 mars 2017, rédigé comme suit:

« La demande de pièces de circulation a sensiblement baissé depuis l’arrivée de l’euro et la popularité grandissante des moyens de paiement électroniques. Le nombre de pièces frappées mises en circulation a baissé de 770 millions en 2001 à 68 en 2015. Les nombreux coûts fixes inhérents à la frappe de la monnaie pèsent sur la rentabilité. La Commission Européenne recommande en outre d’acheter les surplus de stocks dans les autres Etats membres au lieu d’en produire soi-même.

La MRB continuera d’assurer le développement et la commande des pièces ainsi que la lutte contre les faux-monnayeurs. »

Le Ministre des Finances, Johan Van Overtveldt a par ailleurs déclaré:

« Cette décision est conforme à l’accord de gouvernement et fait suite à différents audits. En raison de la baisse de la demande de pièces de circulation, ces coûts de fabrication élevés ne se justifient plus. La Banque Nationale a elle-même également décidé, pour des raisons d’efficience économique, de mettre progressivement un terme à la production de billets » (NDLR: L’ imprimerie fiduciaire belge de la Banque Nationale Belge fermera définitivement ses portes en 2020 et les billets euros belges émis pour le compte de la BNB seront imprimés dans d’autres pays européens par des imprimeurs privés ou publics). 

 

NUMISMAG : Quel sera l’avenir des pièces de 1 et 2 cents?  Y a t’il risque de pénurie de ces pièces comme l’indique un article de notre confrère La Libre Belgique (article du 17/07/2018)? Va t’on vers une suppression pure et simple de ces pièces au niveau européen?

INGRID VAN HERZELE: Depuis  fin 2016 nous n’avons plus produit des pièces de 1 et 2 cent à l’exception d’un petit stock de flans qui – vu la fermeture de nos ateliers de frappe fin 2017-  a quand même été frappé encore en octobre 2017 (1.634.500 pièces).

Je vous trace le contexte  dans lequel nous  n’avons plus eu l’autorisation de produire ou commander à partir de 2018 des pièces de  1 et 2 cents.

Vous êtes sans doute au courant que  depuis janvier 2018 la Monnaie Royale de Belgique a dû externaliser sa production de pièces de circulation et de pièces commémoratives. Un marché public publié à ces fins a été gagné par la Monnaie Royale des Pays Bas (KNM). C’est cette entreprise qui va, pour les 4 ans à venir,  frapper la monnaie belge, néanmoins  après commande de la MRB.

En ce qui concerne les pièces de 1 et 2 cent, il est vrai que les frais de production sont très élevés dans la mesure où produire une pièce de 1 cent coûte environ 1.20 cent ……

La BNB a entretemps chiffré que, par personne, 150 pièces  de 1 et 2 cent  sont en circulation .  Beaucoup de particuliers gardent ces petites pièces rouges chez eux  et ne paient plus  avec ces pièces. Pourtant ils peuvent pour chaque paiement payer  avec ces pièces, mais ceci limité à 50 pièces par paiement.

Depuis le changement de législation,  voté  en 2015, chaque commerçant a la possibilité d’arrondir    les paiements en cash mais aussi les paiements électroniques. Le secteur des grossistes et des détaillants a été au coeur de cette réforme législative.  Malgré cette possibilité  c’est un fait que peu  appliquent  l’arrondi. Pourtant dans des pays comme la Finlande, L’Irlande et les Pays-Bas, l’arrondi a été un succès, suite à l’abandon de la production des pièces de 1 et 2 cents.

En conclusion  la règlementation actuelle rend l’application de l’arrondi tout à fait possible. Les pièces de 1 et 2 cents continuent d’exister comme moyens de paiement légaux. Elles ne sont pas retirées de la circulation et ne perdent pas leur valeur. Elles peuvent donc toujours être utilisées et le client ne peut pas les refuser quand un commerçant ou une personne exerçant une profession libérale lui rend la monnaie.

C’est   seulement au niveau européen que l’on peut décider de retirer des pièces de monnaies de la circulation en les démonétisant.

Aucune décision en ce sens n’a été prise, actuellement.

La semaine passée ce dossier des 1 et 2 cent a été dans l’actualité en Belgique et pour l’instant il est traité au niveau du Ministre de l’Economie, ministre qui a le leadership dans d’éventuelles changements de la législation belge sur l’arrondi (NDLR: un article paru dans La Libre Belgique le 17/07/2018 fait état d’un projet de loi à l’étude qui rendrait obligatoire – celle ci n’étant à ce jour que facultative – la règle de l’arrondi au multiple de 5 cents le plus proche du prix, sur demande des syndicats de professionnels du commerce de détail).

 

NUMISMAG : Depuis la fermeture de l’atelier de la Monnaie de Belgique, quelles sont les fonctions  que la MRB a conservé?

La MRB conserve ses activités régaliennes : la commande des pièces de circulation, la répression de la fausse monnaie et la représentation de l’État Belge au niveau international.

La frappe des pièces de circulation et commerciales est  sous traitée, néanmoins c’est la MRB qui assure le suivi et la coordination du cahier spécial des charges relatif à la frappe de la monnaie et à l’attribution de droits d’exploitation visant la production de pièces de monnaie en euros au bénéfice de la Monnaie royale de Belgique.

 

NUMISMAG : Quelle est ou quelles sont les raisons qui vous ont incité à choisir la Monnaie des Pays Bas comme sous-traitant pour les 4 années à venir ?

INGRID VAN HERZELE: La Monnaie des Pays Bas a été choisie sur base d’une comparaison des offres émis dans le cadre de la procédure cahier de charge. L’attribution a été faite le 22 janvier 2018 et à ce moment le communiqué de presse indiquait ;

« Frappe de la monnaie belge définitivement attribuée à la ‘Koninklijke Nederlandse Munt’/Groupe Heylen. »

La procédure ouverte relative à la frappe de la monnaie et l’attribution de droits d’exploitation visant la production de pièces de monnaie en euro au bénéfice de la Monnaie Royale de Belgique a abouti à l’attribution définitive à la ‘Koninklijke Nederlandse Munt, elle-même détenue par le groupe Heylen.

Le Ministre des Finances, Johan Van Overtveldt a déclaré à ce propos:

« La décision d’arrêter de frapper des pièces a été prise plus tôt, et faisait partie de l’accord de gouvernement. Nous avons réussi à réaliser efficacement cet exercice d’économie en très peu de temps. Cette sous-traitance représente une économie de près de 3 millions d’euros par an. »

L’adjudication est valable pour 4 ans et concerne la frappe des pièces en euro pour la Belgique, les droits d’exploitation pour la frappe, ainsi que la répartition et la vente des pièces commémoratives belges.

Les missions de la Monnaie Royale de Belgique ont été réduites depuis le 1er janvier 2018. Anciennement entreprise d’Etat, la MRB a été transformée en service administratif  à comptabilité autonome depuis le 1er janvier 2018.

La MRB continue à assurer la commande des pièces de circulation, le design, le contrôle de qualité, ainsi que la lutte contre le faux-monnayage. La représentation de la Belgique au niveau international reste également une des tâches clés.

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Entrée principale Monnaie des Pays Bas à UTRECHT (droits photos NUMISMAG)

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NUMISMAG : Quelles sont les pièces de collection qui seront émises d’ici la fin de l’année  par la MRB (Monnaie Royale de Belgique)?

Les différentes émissions numismatiques du programme numismatique belges 2018 (voir ici article NUMISMAG de présentation du programme numismatique belge 2018 avec les visuels des pièces) sont au nombre de 15 et se déclinent de la manière suivante:

 

Programme numismatique 2018 de la MRB (Monnaie Royale de Belgique)
Valeur Métal Sujet Tirage
1 2 €  cu-ni 50 ans mai 1968 250000 UNC +7500 BE
2 2 €  cu-ni 50 ans satellite européen ESRO2B 250000 UNC +7500 BE
3 2,50 €  cu-ni diables rouges 500 000
4 2,50 €  cu-ni 400 ans du Mont de Pièté 50 000
5 5 € cu-ni 100 ans armistice 100 000
6 5 € argent 60 ans des Strumpf 12500
7 10 € argent RUBENS 7500
8 10 € argent 40ans décès de Jacques BREL 5000
9 12,50 € or Reine Louise Marie 2500
10 20 € argent 50 ans satellite européen ESRO2B 5000
11 25 € or 10ans décès Hugo CLAUS 7500
12 50 € or RUBENS 1000
13 100 € or 25 ans décès du Roi BAUDOUIN 750
14 3,88 €  cu-ni set annuel BU 40000
15 3,88 €  cu-ni set annuel BE 750

Source: MRB.

 

20€ Satellite IRIS 2018

100€ BAUDOIN de BELGIQUE 2018

NUMISMAG : Une seconde pièce commémorative de 2€ est elle prévue en 2018? Si oui, quel en est le sujet et le tirage?

INGRID VAN HERZELE: Oui, il s’agit de la pièce commémorant les 50 ans du lancement  du satellite européen ESRO 2B (après appelé IRIS). Cette monnaie sera émise à hauteur de 250 000 exemplaires en qualité UNC et 7500 exemplaires en qualité BE.

2€ BE 2018 Satellite IRIS

2€ BU 2018 Satellite IRIS – version francophone

2€ BU 2018 Satellite IRIS – version neerlandophone


Combiné pièce commémorative Argent et 2€ commémorative Satellite IRIS

NUMISMAG : La MRB envisage t’elle d’émettre une série divisionnaire 2018 en qualité BU et/ou BE ?

INGRID VAN HERZELE: Oui, le set  est prévu en qualité BU (40 000 exemplaires) et BE (750 exemplaires).

 

NUMISMAG : La Monnaie Royale de Belgique envisage t’elle à l’avenir d’émettre une série divisionnaire « low cost » à moins de 10€, comme le fait depuis plusieurs années la Monnaie des Pays Bas ?

INGRID VAN HERZELE: Rien n’est prévu  pour le moment.

 

NUMISMAG : Quelles seront les thématiques des émissions monétaires belges 2019 ?

INGRID VAN HERZELE: Les thèmes ne sont pas encore approuvés par le Ministre des Finances, en attendant pas de communication  disponible.

NUMISMAG : Dans l’avenir, la MRB envisage-t’elle de frapper une pièce présentant une innovation technologique particulière (frappe sur un flan bi ou tri-métallique) ?

INGRID VAN HERZELE: Non, pour l’instant cela n’est pas prévu.

 

NUMISMAG : Luck LUYCX travaille t’il toujours pour la MRB ?

INGRID VAN HERZELE: OUI et il assure le design pour les pièces commémoratives et les pièces de circulation belges.

 

NUMISMAG : Quelles sont les quantités de monnaies de circulation frappées par la Belgique de 2016 à 2018 par valeur faciale ?

Les tirages des monnaies de circulation belges sont les suivants pour les années 2016 à 2018:

Tirages des monnaies de circulation – Belgique
2016 -2017
Année de production millésime pièce 1 cent 2 cents 5 cents 10 cents 20 cents 50 cents 1 euro 2 euros
2016 2016 29 750 000 16 250 000 19 900 000 0 0 2 000 000 0 0
2017 2016 0 0 8 500 000 0 0 0 0 0
2017 2017 1 634 500 0 48 444 500 3 000 000 0 5 000 000 0 0

Source: MRB

NUMISMAG : Une société sans cash (cashless society) vous semble t’elle possible ?

INGRID VAN HERZELE: Elle ne sera pas possible dans l’immédiat, pensez seulement aux gens qui n’ont pas de PC ou ne sont pas dans la possibilité d’apprendre les transactions digitales…Il est un fait que les jeunes sont plus orientés vers l’électronique mais le chemin vers une société tout à fait cashless ne va pas être facile : pensez par exemple aussi aux risques de cybercriminalité…. et l’expérience en plus, qu’en temps de crise les gens préfèrent du cash…

 

Sources : Monnaie Royale de Belgique et NUMISMAG©.

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