Jean Luc MARECHAL et le groupe Facebook « Les inconnus de la NUMISMATIQUE »

L’équipe de NUMISMAG a pu constater à plusieurs occasions le dynamisme de groupes Facebook, dédiés à la numismatique. Nous avons réalisé l’interview de Jean Luc MARÉCHAL. Ce dernier, ancien graveur de la Monnaie de Paris, est le co-animateur du groupe « Les graveurs méconnus de la numismatique».

C’est avant tout l’originalité du sujet sur lequel son groupe se spécialise qui a retenu notre attention et nous vous proposons de découvrir ce groupe et son co-administrateur dans l’interview qui suit.

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NUMISMAG: Jean Luc MARECHAL, quel est votre parcours professionnel ?

Jean Luc MARECHAL: Je suis né en 1946, dans la haute vallée de l’Ubaye. Pendant toute mon enfance, j’ai aimé dessiner… Il était donc normal qu’à l’âge de choisir un métier, en 1962, je m’oriente vers l’école Boulle. Après le premier trimestre d’observation, j’ai opté sans aucune hésitation pour l’atelier de gravure en modelé. Quatre ans plus tard, muni de mon diplôme, j’ai travaillé dans plusieurs ateliers avant de m’installer en tant qu’artisan.

J’ai beaucoup appris pendant cette période, entre 1972 et 1977. Pour gagner sa vie, il ne fallait pas faire le difficile. J’ai gravé vraiment de tout, depuis le bijou religieux jusqu’au tableau de bord de la GS-Citroën, en passant par des armes à feu et des moules de suppositoires ! Mais, avec l’ami avec qui j’étais associé, nous avons réalisé nos « chefs-d’œuvre » pour montrer ce dont nous étions capables. Nous sommes même allés les présenter au Président de la République ; nous n’avions pas froid aux yeux !

C’est alors que j’ai été sollicité par Monsieur Émile Rousseau, Graveur Général des Monnaies, qui cherchait des graveurs pour étoffer l’atelier de gravure de la Monnaie de Paris. J’ai donc préparé sérieusement et réussi le concours d’entrée en 1977.

N: Sur quels projets de monnaies de circulation et commémoratives avez-vous travaillé à la Monnaie de Paris ?

JLM: J’ai travaillé presque 30 ans à la Monnaie, me perfectionnant, découvrant les subtilités de la gravure monétaire, jusqu’au jour de 1987 où le « Patron » m’a confié l’étude de la nouvelle pièce de 10 francs destinée à remplacer la France industrielle dite « Mathieu » et la « Jimenez ».

J’ai donc proposé des thèmes sous forme de croquis, puis des dessins jusqu’à ce que le choix du Génie de la Liberté soit avalisé par le Ministère des Finances.

Dessins préparatoires de la 10 francs Génie 1988.

Moulages 10 francs Génie de la Bastille – gravée par Jean Luc MARECHAL

Ensuite j’ai réalisé la gravure en taille directe, technique qui était encore courante à cette époque, mais qui fut par la suite interdite.

La gravure s’effectue en creux, à la dimension de la pièce, comme ça s’est toujours fait avant l’invention du tour à réduire.

J’ai participé à dessiner ou graver beaucoup de monnaies commémoratives, dont la Zola-Germinal, la Braille, les séries sur l’Égypte, l’architecture, les transports, etc.

Platre de la pièce consacrée à CHAMPOLLION – Gravure de Jean Luc MARECHAL

Dessin de la 10 francs CHAMPOLLION 1998

Détail du visage de CHAMPOLLION – la gravure de Jean Luc MARECHAL donne un vrai relief au visage de l’égyptologue

Dessins de la 100 francs BRAILLE en argent 1999

Avers et revers de la 100 Francs LOUIS BRAILLE 1999

Chaque création est une belle occasion de découvrir un sujet nouveau et de chercher à le raconter le mieux possible. Ma dernière création en 2006 a été une pièce « Mozart » pour les 250 ans de sa naissance.

Avers et revers de la 10€ MOZART, gravée par Jean Luc MARECHAL

Platre de la 10€ Mozart 2006

DAO préparatoire  de la 10€ MOZART 2006

N: Avez-vous gravé des monnaies ou médailles étrangères ?

JLM: Nous avions souvent des gravures à faire pour des pays étrangers, notamment nos anciennes colonies d’Afrique, avec des textes en langue arabe. Plutôt que de risquer des erreurs en gravant les textes, je me suis inscrit à un cours de langue arabe, et tout naturellement j’ai eu à dessiner et graver bon nombre de monnaies pour la Syrie, l’Arabie Saoudite, etc. J’étais devenu « le spécialiste » en la matière !

N: Êtes-vous collectionneur vous-même ?

JLM: Pas du tout ! Je n’ai d’ailleurs connu aucun graveur qui le soit… Je garde seulement tout ce qui concerne mon pays d’adoption, la Roumanie, mais dans une optique historique et pas numismatique : la rareté, la valeur des pièces n’ont aucun intérêt dans ma collecte.

N: D’où vous est venue l’idée d’un groupe dédié aux graveurs méconnus de la numismatique?

JLM: Cette idée vient d’une discussion avec Bruno Visentini, président de la FFAN, qui l’a mise immédiatement en action ! Nous avons tous des pièces dont on ne connaît pas l’auteur, ou dont on ne sait presque rien à son propos. Il nous a paru intéressant de combler cette lacune.

N: Pourquoi ne pas avoir créée une association loi 1901 ?

JLM: Pourquoi en aurions-nous créé une ?

N: Pensez-vous que les associations Loi 1901 ont encore leur place dans le paysage numismatique français ?

JLM: Je ne connais presque pas le milieu numismatique, je ne sais pas comment il fonctionne, je ne peux donc pas répondre à votre question. Dans les domaines du patrimoine, les associations Loi de 1901 ont toute leur place. Mais beaucoup d’actions se font via des sites Internet et les réseaux sociaux. Je pense qu’il doit en être de même pour la numismatique.

N: Quel type de sujet propose votre groupe aux abonnés Facebook ?

JLM: Notre groupe a pour unique objectif de mettre en lumière des graveurs, des médailleurs ou sculpteurs ayant participé à créer des monnaies et des médailles. Certains n’ont pas signé leurs travaux et sont restés dans l’ombre, d’autres, même en signant, ne sont jamais mis sous les feux de la rampe.

N: Pouvez-vous nous donner un exemple de graveur et de recherches que vous avez effectuées?

JLM: J’ai commencé par Anastase, médailleur dont je possède la médaille sur Constantin Brâncusi. Alors que je travaillais à la réalisation d’une réplique à échelle réduite de la colonne sans fin, j’ai réalisé que je ne connaissais rien sur cet Anastase… Je n’avais même pas imaginé qu’il puisse être Roumain (article dédié au graveur Anastase: voir ici).

Médaille dédiée au sculpteur BRANCUSI, par ANASTASE

N: Combien de membres compte votre groupe Facebook « Les graveurs méconnus de la numismatique». Quels sont leurs centres d’intérêt (époque classique, antique, moderne, pièces de monnaie, médailles) ? De quels pays sont-ils originaires ?

JLM: Le groupe n’est créé que depuis le 10 novembre 2018. Le 90^e membre vient de s’inscrire ce 14 janvier 2019. Nous ne cherchons pas à être des milliers. Nous sommes en période de rodage. Je pense que l’on y verra plus clair au bout d’un an. Je questionne souvent les arrivants sur leurs motivations, et je n’ai malheureusement pas beaucoup de réponses…

J’ai déjà rappelé plusieurs fois que nous ne sommes pas un groupe destiné à identifier des monnaies ou des médailles, il y en a qui font ça très bien, mais un groupe de gens qui travaillent à présenter le résultat de leurs recherches… Évidemment, ça limite les participants actifs.

N: Quels sont les graveurs peu ou pas connus que vous avez pu identifier? Combien d’articles avez-vous déjà mis en ligne?

JLM: On pourrait considérer que tous les graveurs sont méconnus. Ce sont des opportunités qui nous conduisent à choisir un personnage.

Trois articles sont édités, plusieurs autres en cours d’enquête et de rédaction.

ANASTASE Demetre Par Jean-Luc Maréchal

DAVIN Auguste. Par Antoine Clerc

De LONGUEIL Honoré Par Jean-Charles Viguier

Articles prévus :
BLOC André Par Jean-Luc Maréchal
CANNÉE Eugène Par Jean-Luc Maréchal
DUFRESNE Thérèse Peut-être par Nicolas Salagnac ?
JOLY Raymond Par Albin Rey
MIGNOT Pierre par Nicolas Salagnac ! (presque prêt)
ROUSSEAU Émile Par Albin Rey (commencé)
TROTIN Charles Par Bruno Visentini (commencé)

N: À terme envisagez-vous de publier un livre sur ce sujet?

JLM: Je laisse ce soin à qui voudra l’entreprendre.

N: Quels ont été vos maîtres en matière de gravure?

JLM: Justement, un de ces méconnus de la gravure, qui va prochainement faire l’objet d’un article : Pierre Mignot. Outre mon professeur à Boulle, les graveurs que j’ai admirés le plus sont Thérèse Dufresne, Raymond Joly, Émile Rousseau, Jean-Pierre Réthoré. Je pourrai continuer…

N: De jeunes graveurs comme Nicolas SALAGNAC tentent de faire perdurer la tradition de la gravure. Qu’en pensez-vous ?

JLM: Que du bien. J’ai connu Nicolas lorsqu’il a postulé au concours d’entrée à la Monnaie. Je suis admiratif en voyant avec quel courage, quelle ténacité il mène sa carrière et j’apprécie tout son travail de communication sur le métier et sur les graveurs. J’ai été très heureux de le revoir récemment dans son atelier. Nous avons longuement échangé, et nous nous sommes promis de nous revoir au moins une fois par an.

De mon côté, depuis le mois de septembre 2017, j’essaye de faire bénéficier de mes connaissances tous ceux que cela peut intéresser. Le groupe « 10 France Génie » a été créé afin que je puisse y publier des articles. Je rédige ceux-ci pour qu’ils soient faciles à lire.

Quant à mes archives tant matérielles qu’écrites, j’ai désigné trois Légataires à qui je les donne, et qui se chargeront de les rendre utiles.

L’équipe de NUMISMAG remercie Jean Luc MARECHAL pour le temps qu’il a accordé à cet interview.

Adresse page FAcebook du groupe (voir ici).

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Sources: Jean Luc MARECHAL et NUMISMAG©.